mercredi 16 février 2011

L'ogre de Tunis est tombé... à qui le tour ?


Cela fait un peu moins d’un mois que le régime de Ben Ali est tombé et pendant que la Tunisie et les tunisiens commencent à savourer les bienfaits de la Démocratie, notre pays s’enfonce dans l’immobilisme et le statut quo. Avec un  régime monarchique d’un autre age si on le compare au voisin espagnol ou britannique, la Maroc regarde de plus en plus vers Tunis où le vent de la liberté est venu rafraîchire et libérer une société que l’on croyait irrémédiablement associée à la dictature. Tout n’est certes pas terminé mais la dynamique est lancée et les Tunisiens en récolteront les fruits dans un avenir proche.

Cette brise que les marocains aimeraient tant voir venir balayer leur villes et leurs villages et apporter avec elle, l’oxygène dont ils manquent cruellement, est tellement redoutée que le régime s’emploie dans un réflexe de survie pathétique à nier l’évidence.

Les Tunisiens, en tant que peuple maghrébin si proche de nous, ont déclenché le compte à rebours et aucune réformette ou gesticulation politicienne ne viendra stopper la vague qui se déploie dans les tréfonds de la société. Car les marocains se parlent.

Partout où ils sont, ils échangent et ils écoutent. Dans les grands centres urbains et les villages, ils se prennent à imaginer que l’horizon bouché qui s’offre à eux  se fissure et se lézarde.

A l’instar des tunisiens eux mêmes, les marocains ont été surpris par la fulgurance et la puissance du renouveau tunisien. Et c’est là le plus grand acquis de la Révolution de Jasmin. Désormais personne ne peut dire aujourd’hui avec l’aplomb qui caractérise la parole officielle marocaine que le régime monarchique est en l’état, impossible à faire bouger.

Car si les marocains semblent attachés à la Monarchie c’est que celle-ci ne leur a, au fond, jamais donné le choix. Mais là n’est pas le sujet principal car ce que veulent les marocains c’est un état de droit garantissant les libertés individuelles et collectives, le respect de la dignité humaine, le droit au progrès social, une justice impartiale et indépendante, un gouvernement responsable… Et la Monarchie est capable d’offrir une consistance à ces principes. Mais encore faudrait-il qu’elle se débarrasse de ses oripeaux féodaux et qu’elle entre de plein pied dans la modernité et la civilisation.

En tous cas,  c’est le seul moyen qu’elle a aujourd’hui pour sauver son régime car si la Monarchie continue aujourd’hui de  nier la profondeur du malaise sociale qui affecte l’immense majorité de nos compatriotes, alors elle court le risque de disparaître.

Nous n’espérons évidemment pas que la violence sème la terreur chez nous. Nous ne voulons pas que le pays suinte du sang de ses enfants et que le Maroc sombre dans une violence que personne ne souhaite. Ce que nous voulons, c’est que le régime marocain se démocratise et se modernise. Avec ou sans la Monarchie, les marocains veulent que la prospérité s’exporte de ses palais de toutes sortes pour aller à la rencontre des villes, villages et quartiers pauvres du pays. Nous voulons que personne ne soit jamais inquiété pour ses idées et qu’aucune limite ne soit opposée au débat. Les marocains doivent pouvoir se moquer de la Monarchie et du Roi sans encourir aucun risque. Ils doivent pouvoir débattre de la place de l’Islam dans la société et de la laïcité. Ils doivent pouvoir dire ce qu’il pense de ce vieux conflit qui nous oppose au Polisario et décider en toute liberté de l’avenir qu’il souhaite donner au Sahara.

Ces questions sont importantes pour eux et il est temps qu’ils décident eux-même, comme des grands, de ce qu’ils veulent.

Dans les chancelleries occidentales, la chute de Ben Ali est vécu comme un traumatisme et il est clair que les diplomates français et européens se montreront beaucoup plus attentifs, à l’avenir, aux voix des plus humbles, ceux que les officiels marocains tentent à tous prix de faire taire.

Dans l’atmosphère étouffante du Royaume où le rythme monarchique et son implacable ordonnancement tentent de se montrer tranquille et serein, l’odeur du jasmin est omniprésente. Gageons que ce doux parfum nous apporte, à nous aussi,  la liberté et la prospérité.


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